Difficulté, accessibilité, plaisir de jeu


Après mon article sur DOTA 2 et le suivi que je fais sur le jeu en continuant à y jouer malgré les problèmes que j'ai dessus, j'ai pensé à écrire un petit billet sur les notions que j'ai inscrites en titre. C'est vrai que c'est une réflexion qui peut s'accompagner d'avis multiples et les joueurs se trouvent d'un bout à l'autre du spectre quant à ce questionnement mais je vous propose qu'on l'ait ensemble : quel est le degré de causalité entre la difficulté et le plaisir de jeu ? C'est une question sur laquelle chacun aura un avis propre et je vous propose -loin de vous convaincre- d'avoir une conversation sur le sujet. 


Je vais évacuer tout de suite l'aspect élitiste qu'entraîne le fait de jouer à des jeux vidéo difficiles. Si Bloodborne et Dark Souls ont un statut de jeux cultes auprès de certains, c'est avant tout parce qu'ils sont ultra punitifs et qu'ils répugnent aux joueurs les moins persévérants. Je trouve ce raisonnement des plus toxiques mais c'est une réalité. Doser un jeu que n'importe quel péquin ne peut pas finir apporte une satisfaction pulsionnelle à certains, c'est une évidence. Tant que ça reste en dessous des qualité authentiques du soft, moi ça me gène pas. Bloodborne c'est avant tout un très beau jeu, fouillé et avec une atmosphère gothique incroyable. La difficulté elle vient bien après, même si elle vous explose dès les premiers instants. Donc cette question d'être dans un groupe d'"élus" parce qu'on maitrise un jeu qui est très difficile n'a pour ma part aucune validité. 

Il en ressort néanmoins un plaisir évident lorsque, à force de se prendre des bashes pendant quelques heures, on commence à comprendre et jouer avec les mécaniques de ces jeux. Je me rappelle que j'ai passé beaucoup de mon temps de jeu sur Bloodborne sur le premier niveau qui m'a mis une raclée monumentale. Le reste du jeu m'a moins marqué à part Rom qui m'a fait tellement chier. Certes le jeu est bon mais il ne m'a pas marqué plus que ça et la difficulté dont il fait preuve ne m'a pas donnée plus envie d'y jouer, c'est plutôt le contraire. La même logique m'est inspirée de DOTA 2. J'en suis à 45h de jeu et je suis toujours incapable de jouer contre des vrais joueurs tellement le jeu me fait les fesses. J'ai même pas envie de lancer une game tellement je sais que la toxicité extrême du jeu (à laquelle j'ai eu à faire face sur les quelques games PvP que j'ai testées) et mon manque de compétence va m'attirer les pires cassos de la terres ainsi que le moins de plaisir de jeu possible. 

Jouer 45h à un jeu et être toujours d'en l'incapacité d'en comprendre les phases et le fonctionnement, c'est un état qui n'est pas agréable à vivre. Mais pour moi, ça a aussi rapport à l'âge et le cycle de vie dans lequel on est. On peut me dire ce qu'on veut, si t'as 40 ans et que t'es toujours en train de grinder le ladder d'un MOBA, y'a quelque chose qui a mal tourné dans ta vie. Moi j'ai 34 ans, une vie que je définis plutôt comme équilibrée et le jeu vidéo c'est pas ma priorité numéro 1 même si je joue environ 20h par semaine. C'est une vision de l'esprit et je pense de manière assez définitive qu'il y a des phases dans lesquelles on est juste plus dans le trip. Autant quand j'étais plus jeune je grindais le ladder de SF4, autant aujourd'hui je serais incapable mentalement de le faire parce que ça ne m'intéresse pas et que j'ai des choses plus épanouissantes à faire de ma vie. Du coup jouer à des jeux difficiles d'accès, ça me gave plus d'autre chose même si j'aime parcourir les vidéos de tuto et les guides pour comprendre des choses basiques.

Attention, je comprends parfaitement, pour reprendre l'exemple de DOTA 2, que la maitrise d'un tel jeu provoque sûrement un plaisir de jeu énorme. Ce que je n'aime pas, c'est la différence entre difficulté et difficulté d'accès. DOTA 2 est un jeu qui comporte les deux aspects. HotS est un jeu facile d'accès mais difficile quoi qu'en disent les dédaigneux des autres MOBA. Il faut pas mal de temps pour comprendre le jeu et savoir prendre les bonnes décisions. Mais les mécaniques sont faciles à comprendre donc on peut se sentir "dedans" rapidement. Blizzard a toujours eu du génie là-dessus pour aspirer les joueurs et leur faire parcourir une courbe d'apprentissage satisfaisante. Aujourd'hui il y a un dédain évident des communautés de jeux plus durs envers ceux des jeux moins durs. On le voit dans le MOBA, on le voit dans le jeu de combat, on le voit dans les FPS. 

Autre exemple : Tekken. La porte d'entrée dans le jeu est très accessible, ça a toujours été une grande force de la licence. Tout le monde peut s'amuser, même en tapotant sur tous les boutons. Mais apprendre les techniques de déplacement et de stances sont bien plus compliquées. A l'inverse, un jeu comme Guilty Gear n'apporte strictement rien à celui qui n'a que quelques heures de jeu. Les mécaniques sont tellement compliquées et situationnelles que je ne prends plus aucun plaisir à devoir ouvrir Wikipédia pour comprendre comment jouer un perso. Mais libre à vous de vous investir à votre degré de volonté. Et c'est ça que je cherche aujourd'hui : des jeux où tu peux très bien jouer pour le plaisir de manière casual mais aussi plonger un peu plus profondément si tu en as l'envie. Et des jeux comme DOTA, Dark Souls ou Super Meat Boy ne possèdent pas ces degrés d'entrée. Être confronté à un mur pendant des heures avant de pouvoir progresser, c'est un truc pour les jeunes qui ont du temps à perdre. Rendu à un certain stade, t'as envie à la fois de qualitatif et d'incitatif. Ce n'est pas une excuse pour me dédouaner de ce type de jeu, vous avez déjà compris que j'étais mauvais. C'est juste ma vision du plaisir de jeu et de la rentabilité que je mets dans ces heures de jeu. 

J'essaye d'expliquer clairement mon avis mais j'ai l'impression de donner une vision un peu trop utilitaire à mes sessions de jeu mais bon, les mots ont une limite. Mais je sais que vous m'avez sans doute compris et que plusieurs d'entre vous sont dans le même cas. Le jeu vidéo, c'est avant tout du jeu.

Commentaires