L'inutilité du travail

Difficile d'aborder un sujet aussi central que celui du travail mais cela fait plusieurs mois que je me demande si je vais écrire cet article ou pas. Parce que tout le monde ne va pas le comprendre. Je poursuis une voie de développement personnel qui m'amène depuis maintenant 10 ans à reconsidérer tout ce que je tenais pour acquis et si un sujet s'est depuis longtemps attiré les foudres de mon jugement, c'est bien le travail. Je vous préviens donc : ce billet est une réflexion, une construction autour d'une thématique. Je ne suis d'aucun bord politique et je développe des idées en dehors de toute prise en compte sociale, économique.


J'ai 33 ans, en alignant côte à côte mes temps de travail, je suis environ à 5 ans de travail. J'ai calculé que si je travaille à temps complet sans interruption, j'aurai rempli mon compte retraite vers 70 ans. On est bien. 33 ans c'est jeune, et pourtant je développe une aversion toujours plus prononcée pour le travail. Je ne comprends simplement pas son but. Enfin si : engraisser les puissants en rongeant ce qui est le plus précieux dans la vie : le temps et l'énergie personnelle. Je ne comprends toujours pas par quelle dérive absurde nous en sommes arrivé à cette construction de la vie humaine : va à l'école, allez, chope tes diplôme, allez va bosser. VA BOSSER ALLEZ. Bouge-toi allez trime, perd ton temps pour moi dépêche-toi. Allez rentre chez toi va dormir. Allez reviens jusqu'à la fin de ta vie. 

Quelle est cette folie ? Le travail est sans doute la notion que je comprends le moins aujourd'hui. N'apportant aucun intérêt à l'épanouissement personnel, créant conflit et mal-être en plus de dérouter le cycle physiologique, le travail c'est pour moi l'anéantissement de la vie, le but contraire de ce pourquoi nous sommes venus au monde. Je pense souvent aux futurs enfants, dans quelques siècles, à qui ont apprendra comment c'était dans l'ancien temps. Regardez le ridicule : "alors vous voyez les enfants, les gens devaient allez dans des endroits pour ce qu'on appelle "travailler". Ils passaient toute la journée à réaliser des tâches pour d'autres personnes et en contrepartie on leur donnait de l'argent. Grâce à ça ils pouvaient se payer à manger et vivre dans une maison." Quel ridicule.  

Le problème que je trouve le plus scandaleux, c'est l'importance que prend le travail dans la vie aujourd'hui. De lui découle tout car de lui vient notre subsistance. Il fournit le salaire donc la nourriture, les loisirs, l'hébergement, le statut social. J'ai opté depuis quelques années de changer d'optique et me recentrer sur les choses qui comptent : suis-je un bon fils ? un bon frère ? un bon ami ? La question de savoir si je suis un bon travailleur, j'en ai vraiment rien à foutre. Je fais mon travail pour qu'il soit de bonne qualité mais pour vous expliquer par une image, c'est une bulle dans ma vie. De 8h à 17h, je suis dans cette bulle mais je la considère à part, elle ne fait pas partie de ma vie. C'est pour ça que je n'attache aucune importance à ce que je fais. Cela n'existe pas pour moi. Mes objectifs de vie, c'est de me développer dans ce que j'aime. Par exemple je suis hardcore en sport, j'aime me dépasser parce que je me mets en défi envers moi-même. Dans le sport j'ai une détermination et une discipline que je n'ai nul part ailleurs. Pourquoi dépenserai-je de l'énergie à mettre de la discipline et de la détermination dans le travail, quelque chose qui ne m'intéresse pas du tout et qui ne me représente en rien ?

Et ce qui est terrible, c'est que la société fait une fixation sur le travail comme activité. J'en parlais avec mes parents et ils me disaient "Mais si tu ne travaillais pas, tu ferais quoi ? Tu t'ennuierais." Le travail, ce n'est pas "avoir une activité". Si j'avais le temps, je le passerai à faire ce qui me passionne, ce que j'aime. Je pourrais passer mon temps à des activités qui m'apporte confiance et plaisir. Parce que passer 8h à faire quelque chose qui n'a aucune importance pour soi, c'est pas ce que j'appelle s'épanouir. Chaque soir je suis frustré de n'avoir le temps de rien faire alors qu'il y a tellement à entendre, à voir, à lire. 

Le problème principal, c'est que toute la société est construite sur la sacro-sainte "valeur travail". J'entend tous les matins à la radio les problèmes sur le taux de chômage énorme, les agriculteurs qui vendent à perte, les politiciens qui sortent les mêmes phases depuis 30 ans sans que ça change quoi que ce soit. Tout ça c'est parce qu'on a accordé au travail une valeur qu'il n'aurait jamais du avoir. Ça aurait du rester une activité marginale voire même elle n'aurait jamais du exister. Alors bien sûr, s'il n'y avait plus de travail, il n'y aurait plein de secteurs où il n'y aurait plus personne. Si on laissait les gens exercer une activité sur ce qu'ils aiment, plusieurs secteurs s'écrouleraient. Et alors ? Pourquoi cela serait-il mauvais ? 

Mes idées sont claires : je suis contre ce qu'on appelle "le progrès" mais qui est en fait l'opposé : une régression sans fin par la perte des valeurs humaines. Oui, aujourd'hui on a des tablettes tactiles, des voitures à l'électricité. Ça nous fait une belle jambe. Le monde est rempli de malades et d'imbéciles qui sont complètement déconnectés de la nature humaine. Passer son temps sur Instagram, c'est le summum du progrès humain, j'avoue. Je passe de plus en plus de temps à regarder ce qui m'entoure, comme ça, pour prendre le temps de m'imprégner. Aujourd'hui l'être n'a plus aucune importance, c'est le faire qui détermine ce que nous sommes aux yeux des autres. Un patron d'une multinationale sera le symbole du succès alors qu'humainement c'est sûrement une merde qui a sacrifié de nombreuses vies pour son profit personnel. Au contraire un chômeur c'est un oisif qui n'a aucune passion ni aucun intérêt, c'est connu. Ça fait un peu "pensée de gauche" de dire ça mais je ne suis d'aucun bord. Mon bord serait de recommencer un autre monde.

Quand je rencontre quelqu'un, j'ai pris l'habitude de demander non pas quel est son travail mais quelles sont ses passions. En découlent souvent des discussions savoureuses, par exemple :
"Salut je suis Vincent.
- Bonjour, moi c'est XX
- Salut, t'as des passions dans la vie ? 
- Pourquoi tu me demandes ça ? 
- Parce que j'ai envie de te connaître un peu. J'aurais pu te demander ce que tu fais dans la vie mais ton travail c'est ce qui te définit le mieux ? 
- Non, pas vraiment."  

Je pourrais être peintre en bâtiment ou comptable, en quoi cela me définirait ? J'ai déjà été intérimaire, agent de surveillance et webmaster. C'est sensé me définir ? Donc c'est quoi le point commun entre ces différents métiers ? Non, bien sûr : le travail ne définit absolument rien. Pour moi du moins, peut-être est-ce le cas pour vous. Il n'a plus aucune importance pour moi. Je travaille parce que cette société m'impose de le faire mais psychologiquement je ne fournis rien de moi. Je suis là, je réalise des choses mais ce n'est pas moi qui suis à ce bureau. C'est le Vincent que les gens voient en moi. Le vrai, il est loin, très loin. Il est désactivé pendant ces heures inutiles, entre 8h et 17h. 

Commentaires

  1. Salut Vincent,
    Je pense que la majorite des gens pensent comme toi, apres ce n'est jamais facile de mettre des paroles et des mots sur ce genre de pensee, merci de l'avoir fait. Il existe tout de meme certaines personnes qui s'epanouissent au travail, mais si comme tu l'as dit la notion de travail n'avait pas une valeure sociale si importante, peut etre que d'un seul coup ils essaieraient de s'epanouir de facon differente. Au final, le probleme est toujours le meme, la majorite des gens n'en n'ont rien a faire de leur taf, mais premierement l'admettre, c'est avouer que sa vie c'est de la merde, et deuxiemement, si tu ne travailles pas, bien sur, tu peux t'epanouir autrement, mais malheureusement le travail est la seule facon, disons feignante, pour subvenir a ses besoins minimums actuels. Je dis actuel, car si tu es capable d'admettre que tu n'as pas besoin de tout ce confort materialiste, je suis persuade qu'il n'est pas si difficile d'etre auto-suffisant. Mais la encore, si tu y arrives, tu te retrouves coupe de tes amis et famille, qui n'auront probablement pas franchi la barriere. Se separer d'un confort materiel, c'est une chose, accepter de se distancer de tous les gens que tu aimes en est une autre. Au final, je suis completement d'accord avec toi, mais je comprends aussi tres facilement pourquoi personne ne le fait. Je peux finir en citant Into the Wild, le bonheur ne peut etre apprecie que si il est partage :-)

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    1. C'est bien pour ça que je dis qu'il faudrait tout reprendre à zéro car aujourd'hui, c'est toute la construction sociétale qui ne permet pas de sortir de ce schéma...

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    2. Bonjour, 1er janvier 2020... Il est bientôt 3h du mat' et cherchant une "inutilité" ou "un non sens" à ma vie je suis tombé sur votre texte... Presque 4 ans se sont passé depuis que vous avez écrit ces mots... Il me paraissent frappés du bon sens tant l'état du monde est catastrophique... Un spécialiste des ressources citait récemment une étude prédisant qu'en 2060 (donc dans 40 ans) l'humanité consommera le double des ressources annuellement extraites de la nature... Alors que les pénuries se font déjà sentir. J'ai démissioné d'un énième boulot à la con (j'en ai fait plein de différents) parce que j'avais la nausée en pensant à l'inutilité et à la toxicité de ce pour quoi je laissais mon énergie... Aujourd'hui, j'essaye de prendre soin de moi et de ma famille... J'essaye aussi à mon petit niveau de "changer le monde" (tel un doux rêveur) en m'attaquant aux problemes que cette société "malade" de surfinanciarisation, de surproduction et de surconsommation à créés... Au premier rang desquels la pollution atmosphériques, mais aussi des eaux et des sols... Et le crime contre la diversité naturelle, végétale, animale (en incluant les insectes) et humaine... Nous sommes plus riches que ça... Nous pourrions construire un monde plus intelligent collectivement... Encore faut-il le vouloir collectivement... Faire évoluer les consciences, en voilà un travail (un métier ?) passionnant.

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